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La Vie sentimentale de Bruce Lee (1976) |
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Le phénomène des faux Bruce Lee qui a fait rage à la fin des années 70 ne peut que laisser perplexe vu plus de vingt ans après. Courant exploitationniste ultime (pas l’ombre d’une ambition artistique présente), il n’aura donné naissance qu’à des œuvres dégénérées d’où on ne peut isoler que quelques chorégraphies correctes ou s’amuser des scénarios plus grotesques les uns que les autres. Pourtant, la vie de Bruce Lee, son œuvre aussi bien martiale que cinématographique a été riche en événements dramatiques propices à un récit filmique. De premier abord, Bruce Lee And I semble vouloir aborder la vie du Petit Dragon de manière sérieuse, raconter réellement ce qu’a été une page de sa vie et non partir dans des délires grotesques à base de multiples clones. A l’origine du métrage, on retrouve l’actrice Betty Ting Pei dont la principale légitimité dans l’opération est d’avoir été la maîtresse de l’acteur ainsi que celle qui l’a vu en dernier vivant (avec Raymond Chow), Lee étant décédé dans son appartement. C’est sur la base de ce vécu que le film est bâti. Voila pour les intentions affichées. Malheureusement, ce qui aurait pu être le film de chevet de tous les fans respectueux du Petit Dragon ne se révèlent être qu’une pitoyable farce, encore plus insultante envers l’acteur que ne pouvait l’être des œuvres comme Goodbye Bruce Lee ou Bruce Lee - A Dragon Story.
A vrai dire, il ne faut que quelques minutes pour comprendre quelle est la véritable intention du film. Ce n’est en rien le fait de raconter respectueusement ce qu’a été la vie de Bruce Lee. Non, le véritable objectif, c’est de servir de manifeste défensif pour Betty Ting Pei contre les tabloïds Hong Kongais qui la traînait dans la boue pour avoir été une maîtresse voire, l’accusait carrément d’avoir provoqué la mort du Petit Dragon. Le premier tiers de Bruce Lee And I sera donc consacré à l’histoire de Betty (jouant son propre rôle), de son enfance à sa venue à Hong Kong. Malheureusement, le pourtant talentueux Evan Yang s’éloigne de la réalité pour recycler toutes les vieilles recettes éculées du mélodrame tendance année 50. Betty nous est montré comme une pauvre victime, une jeune fille pure et fragile exploitée par des hommes libidineux et mauvais. Préparez vos mouchoirs ! La pauvre Betty se retrouve ainsi à devoir faire la doublure corps pour des actrices plus prestigieuses, elle qui se voyait déjà star du grand écran. Rappelons tout de même qu’il s’agit d’une étape par laquelle l’actrice n’est jamais passée. Pire encore, Betty a, au contraire, régulièrement joué de son image sexy pour se faire connaître et ne s’est pas gênée pour avoir recours aux doublures corps dés qu’une scène de nue s’avérait nécessaire (c’est encore le cas ici). Bref, c’est l’hôpital qui se fout de la charité et les ficelles dramatiques utilisées sont vraiment trop grosses pour être acceptées sans sourciller. Difficile donc de prendre en pitié la gentille Betty, d’autant plus que la jeune femme n’a jamais été une grande actrice et son jeu limité ne fait que renforcer l’aspect grossier du scénario.
Mais cela n’est encore rien par rapport à la suite. Arrive en effet, le grand et l’unique Bruce Lee sous les traits du non moins grandiose Danny Lee, aussi crédible en Bruce Lee que pourrait l’être Jackie Sardou en Marilyn Monroe. Très vite, une romance passionnelle se crée entre les deux tourtereaux. Montrer cette facette de Bruce Lee n’est pas une mauvaise idée en soit. Car si la mythification du Petit Dragon a poussé à l’oublier, il est bon de se souvenir que l’homme était loin d’être un modèle de fidélité, trompant régulièrement sa femme Linda, Betty Ting Pei n’étant à ce titre que la dernière favorite en date. Le problème, c’est qu’une nouvelle fois, grosses ficelles et élucubrations débiles remplacent la vérité biographique et le développement des personnages. Le Bruce de Bruce Lee And I est un empilement de clichés, un avatar dégénéré issu de l’héritage mythologique : Il déteste les gweilos et ne rate jamais une occasion de leur casser la gueule (comment se fait il qu’il avait autant d’Occidentaux comme amis dans ce cas là ?), il possède une salle d’entraînement remplis de dessins à son image (palme d’or du Kitsch et du mauvais goût 78) et est bien sûr amoureux à la folie de Betty (on a du mal à croire que l’actrice se faisait beaucoup d’illusions sur l’attachement que Lee pouvait avoir à son égard). Histoire d’étoffer son récit, Bruce Lee And I fait régulièrement l’impasse sur la vérité historique pour privilégier le drame romantique grossier (Bruce qui essaye de placer Betty à ses cotés dans son prochain film). La pauvreté du scénario n’est en rien arrangée par la réalisation grossière de John Law Ma qui ne peut s’empêcher d’en rajouter dans le vulgaire avec de longues séquences pseudo romantiques où nos deux amants s’enlacent, font du trampoline (!) durant de trèèès longues séquences (le ralenti est de rigueur, hommage à Chang Cheh bien sûr !).
Au sein de cette débâcle artistique de près de 2 Heures, le réflexe du fan est de se raccrocher à ce qui a pu faire l’intérêt d’une poignée de faux Bruce Lee : Les combats. Mais à nouveau, Bruce Lee And I va se montrer d’une triste indigence. Seulement trois affrontements martiaux seront proposés, dont une pseudo recréation de la séquence du dojo de Fist Of Fury bien loin de l’original. A défaut de quantité, on se consolera comme on pourra avec la relative qualité de ceux-ci même si ils sont bien loin de figurer parmi ce que Tong Gaai et Yuen Woo Ping ont fait de meilleur dans leur carrière.
Camouflé derrière son alibi pseudo biographique, Bruce Lee And I ne peut longtemps cacher sa vraie nature d’œuvre aussi grossière que racoleuse. Pire, cette intention de sérieux affichée rend le film de Law Ma encore plus détestable que ces alter égos aux scénarios totalement barrés et à l’exploitationnite assumée. Fan de Bruce ou simple amateurs de bons films, fuyez !
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Arnaud Lanuque 10/7/2006 - haut |
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