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Bullets Over Summer (1999) |
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Bullets Over Summer est un polar dans la lignée de ceux produits par la Milkyway Image de Johnnie To. On pourrait d’ailleurs aisément le rapprocher de Expect The Unexpected, tant la vie intime des hommes de loi est aussi – voire plus – importante que l’intrigue policière. Pour bien saisir la forme du film de Wilson Yip, il suffirait de dire qu’une adaptation théâtrale serait tout à fait possible et en conserverait les thèmes et l’esprit : un même lieu et des personnages qui s’y croisent et s’y découvrent.
A première vue, Bullets Over Summer pourrait s’apparenter à une énième variation sur le « buddy movie », tant de fois décliné au cinéma sous des formes différentes : un vieux – un jeune, un gros – un maigre, un dépressif violent – un père de famille proche de la retraite, un Afro-américain – un Chinois, un homme – un chien (eh oui !), etc. Dans ce type de comédies d’action, le ressort dramatique repose sur l’opposition frontale entre les deux personnages et les scènes de dispute qui s’ensuivent. Wilson Yip, lui, attaque son duo sous un autre angle : pendant près d’une heure trente, le spectateur ne va pas observer les relations entre les deux policiers, mais les relations que chaque policier nouera avec son entourage. Alors que dans un « buddy movie » classique les héros vont apprendre à connaître l’autre, dans Bullets Over Summer, c’est leur propre personnalité et leur moi profond qu’ils vont découvrir. Ce n’est pas la connaissance de sa maladie qui va pousser Mike (Francis Ng) à changer (il déclare à un médecin savoir qu’il en est atteint et lui énonce même les symptômes et leur évolution), mais sa rencontre avec une jeune femme (Stephanie Lam) abandonnée enceinte par son amant. De même, le fougueux et superficiel Brian (Louis Koo), susceptible de piquer une crise car un collègue a acheté les mêmes basket à la mode que lui, devient peu à peu capable d’agir pour les autres, sans attendre quelque chose en échange. Il vient ainsi en aide à une étudiante sans le sou (Michelle Mok) de manière désintéressée.
L’évolution psychologique de ces deux hommes, à l’origine fortes têtes et individualistes, est à mettre au crédit d’une brave grand-mère (Helena Law) au domicile de laquelle ils vont faire une planque de plusieurs jours. Abandonnée dans sa jeunesse par son mari et son fils, elle a sombré peu à peu dans une douce et inoffensive folie. Dès l’arrivée de Brian et Mike dans son appartement, elle les prendra pour son propre rejeton et le fils de celui-ci qu’elle n’a jamais connu. Devant sa gentillesse et sa détresse, les deux policiers vont se remettre en question et devenir ce qu’ils n’ont à aucun moment de leur vie véritablement été, des adultes responsables. Ils seront bientôt rejoints par une femme d’âge mûr enceinte et esseulée, ainsi qu’une étudiante un brin perdue. Ce quinquet de paumés constituera alors une sorte de tribu, pareille à « la roulotte » de Jean Cocteau dans Les Enfants terribles…
Et le polar dans tout ça ? Il faut bien l’avouer, il est annexe et ne sert que de « MacGuffin », de révélateur des âmes de nos deux héros. Pour autant, les séquences d’action sont fort bien menées, intenses en diable, et comme dans toute bonne comédie légère, la violence la plus radicale peut faire soudainement son apparition. C’est bien entendu le cas ici. On sera ravi d’apercevoir l’ancien membre des Venoms, le vétéran Lo Meng, dans une scène pleine de tension à la conclusion hilarante. Nous pourrons aussi assister à un très curieux interrogatoire à base de durian. Pauvre Wayne Lai…
Francis Ng est tout simplement superbe dans son rôle de policier taciturne et renfermé qui apprend à faire confiance aux autres. Il parvient à nous faire sentir l’évolution psychologique de son personnage. C’est décidément un des plus grands acteurs en activité à Hong Kong. Louis Koo a peut-être un rôle plus ingrat, moins « spectaculaire », mais il est lui aussi parfait. En méchant, Joe Lee est une fois encore impressionnant : avec un jeu sur le fil du rasoir, il est véritablement glaçant dans l’intense scène du dîner chez la grand-mère…
Wilson Yip, réalisateur éclectique qui semble curieusement aller de projets personnels (l’intéressant Mongkok Story) en œuvres de commande (le mauvais Skyline Cruisers), nous offre avec Bullets Over Summer un des meilleurs polars de la fin de siècle.
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David-Olivier Vidouze 3/23/2005 - haut |
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