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Tactical Unit: No Way Out (2008) |
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Tactical Unit : No Way Out est le deuxième épisode de la série télé tirée du film de Johnnie To, PTU. Après un premier opus intéressant, The Code, réalisé par Law Wing Cheong, c’est au tour de Lawrence Ah Mon de passer derrière la caméra. Avec lui, le scénario quitte la description d’une unité spéciale de la police pour s’attacher à dépeindre la misère de laissés pour compte de la société hongkongaise, via le quotidien d’un couple constitué d’un handicapé et de sa femme immigrée clandestine.
Des membres de la P.T.U., menés par l’officier Bill (Simon Yam), utilisent un vendeur de cigarettes à la sauvette physiquement diminué, Fai (Derek Tsang), afin de piéger un chef de triade. Les informations obtenues, ils relâchent le jeune homme et font une descente dans le quartier de résidence du mafieux. Outre la traque de ce dernier, l’action des forces de l’ordre provoque également la paralysie des activités illégales environnantes. Privée de ses revenus habituels - trafic de drogue, jeux illégaux et prostitution -, la pègre locale se déploie vers de nouvelles activités plus violentes et fait monter la tension. L’équilibre entre répression et laisser-faire est rompu… Principale victime de cette situation, Fai est pourchassé par les triades qui le jugent responsable. Alors qu’ils tentent de fuir, l’informateur et sa compagne (Wu Li) sont rattrapés ; elle sera sauvagement violée, il sera battu et laissé pour mort, des dizaines de pilules d’ecstasy dans la bouche… Dorénavant, ils n’ont plus d’autre choix que celui de vivre cachés, à la merci de la police et des triades.
D’ordinaire peu encline aux œuvres engagées et politiques (même si les séries Below The Lion Rock (RTHK) ou Social Worker (TVB) osaient déjà emprunter de tels chemins à la fin des années 70), la télévision hongkongaise réserve parfois de belles surprises et, au détour d’un ensemble de téléfilms consacrés à la P.T.U., n’hésite pas à proposer au spectateur une vision assez noire de la société « d’en bas ». C’est vraisemblablement à la personnalité du réalisateur, Lawrence Ah Mon, que l’on doit cette orientation très sociale de l’épisode (même si, il est vrai, le thème du surendettement des policiers est également abordé dans The Code et Human Nature). Œuvrant pour la télévision aussi bien que pour le cinéma, cet ancien assistant-réalisateur de Tsui Hark s’est déjà, par le passé, penché à maintes reprises sur les bas-fonds de la société hongkongaise. Sa conscience sociale s’est notamment exprimée au travers de la série télé RTHK Islander (1981), Gangs (1987), film censuré pour sa dureté et son réalisme, et des Catégorie III Queen Of Temple Street (1990), Spacked Out (2000) et Besieged City (2007). Etrangement donc, Tactical Unit : No Way Out abandonne pendant un long moment les policiers de la P.T.U. pour se concentrer sur les mésaventures des deux « héros », l’indicateur malgré lui et sa compagne. Pour arriver à ses fins, Lawrence Ah Mon n’hésite pas à ponctuer son film de scènes chocs (viol en groupe, prostitution dans des WC publics pour un bout de pain, toilette intime dans un caniveau…), brutales et réalistes, qui mettront mal à l’aise le spectateur le plus endurci. Pour autant, l’amour entre les deux pauvres erres conserve une pureté et une force inaltérables malgré la saleté qui les entoure. La scène au cours de laquelle la jeune femme lave son amant est à ce titre emblématique : une fois chez lui, le vagabond est un roi.
Lorsqu’elle apparaît à l’écran, la police n’est pas épargnée par Lawrence Ah Mon (on se souvient d’ailleurs de la corruption policière déjà dépeinte dans Lee Rock). Elle utilise ainsi un individu faible et sans défense pour arriver à ses fins, le passant à tabac, au passage, dans une ruelle bien sombre, et le laisse sans aucune protection une fois les informations obtenues. Les pauvres n’ont apparemment pas droit à l’assistance des forces de l’ordre : ils ne sont pas uniquement rejetés de la société de consommation hongkongaise, ils semblent également rejetés de l’espèce humaine… Ironiquement, le réalisateur souligne la nécessité, au sein d’une grande ville, de laisser à la pègre un « espace de liberté » et le fait que la police en a tout à fait conscience. Ainsi, lorsqu’une opération d’envergure est lancée sur un quartier tenu par les triades et que celles-ci n’ont plus les moyens de gagner de l’argent, la violence s’accroît dangereusement : les voyous s’attaquent désormais aux habitants pour leur soutirer des valeurs. De l’ordre retrouvé naît l’anarchie… A un subordonné qui lui demande pourquoi tel truand n’est pas poursuivi, son chef lui répond que les quotas de la journée ont été atteints !
Le discours coup de poing de Lawrence Ah Mon est mis en valeur par couple d’acteurs prometteurs, Derek Tsang, fils d’Eric, et Wu Li, nouvelle venue dans le cinéma hongkongais (on ne lui connaît qu’une première expérience sur grand écran, Song Of Everlasting Regrets). Sans pathos, ils restent constamment crédibles et touchants dans leur rôle de parias de la société. L’un est handicapé, l’autre immigrée clandestine, ils représentent à eux deux ceux qui aujourd’hui ne comptent plus… Lawrence Ah Mon est pessimiste : pour ses personnages, c’est « no way out ».
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David-Olivier Vidouze 4/28/2009 - haut |
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